C’était le 10 avril 1994, lorsque les massacres ont commencé de l’autre côté du lac Mugesera, à Kagashi.
Les Musulmans de Mabare ont pris leurs barques et ont sauvé huit Tutsis qui avaient été jetés dans le lac.
L’Imam Rashid Bagabo, dirigeant du Mosquée, était l’organisateur de la résistance.
Les Musulmans ont érigé deux barrages pour protéger les Tutsis, environ 500, réfugiés à l’intérieur du Mosquée.
« A Mabare, nous avons eu deux opportunités. Tout d’abord, les Musulmans étaient convaincus qu’aucune personne ne devait être tuée pour des motifs ethniques », a-t-il déclaré.
La deuxième, a-t-il ajouté, était que le Chef du Secteur de Rubona, qui subissait une pression immense de la part du leader communal, hésitait à soutenir les massacres contre les Tutsis, comme il en avait reçu l’ordre.
Les femmes et les enfants ont collecté des pierres pour les hommes, qui, en plus de leurs flèches et de leurs lances, ont pu repousser les attaques, a-t-il déclaré.
Les miliciens ont eu finalement des renforts des tueurs d’ailleurs et de l’Armée nationale de l’époque (ex-FAR).
Deux attaques inattendues ont ensuite tué presque toutes les personnes qui avaient choisi de rester dans le Mosquée, à l’exception de Bagabo et de quelques Tutsis qui avaient choisi de se cacher dans des papyrus à proximité du lac.
Certains survivants des attaques ont quitté le Mosquée et se sont refugies ailleurs. Bagabo ne les a plus jamais revus, à l’exception d’Alphonsine Musabwamana, l’une des huit personnes qu’ils avaient sauvées avec des barques quelques jours plus tôt.
Apprenant que des libérateurs Inkotanyi du FPR étaient déjà dans la ville de Rwamagana, Bagabo a montré a ceux qui s’etaient refugies dans le marais comment ils pouvaient se déplacer jusqu’à l’endroit où se trouvaient les sauveurs Inkotanyi.
Alphonsine Musabwamana a confirmé qu’elle serait morte si les Musulmans de Mabare ne les avaient pas sauvés de la noyade.
« Nous sommes venus le 10 avril et avons été accueillis par les Musulmans », a-t-elle déclaré.
Lors de l’attaque du Mosquée, elle a blessée à la tête et au cou par la machette, mais elle a réussi à s’enfuir.
L’Imam Bagabo, qui félicite le FPR d’avoir mis fin au génocide, a déclaré : "La vie est revenue à la normale, les gens ont eu à nouveau le goût de vouloir vivre".
Contrairement à d’autres religions, avant 1994, les dirigeants musulmans au Rwanda continuaient d’encourager leurs disciples à ne pas s’impliquer dans l’idéologie du génocide.
Le Cheikh Salim Hitimana de la Communauté musulmane du Rwanda (RMC), a déclaré que ce que l’Imam Bagabo et d’autres musulmans de Mabare avaient fait était le résultat d’un communiqué de la RMC, publiée le 12 mars 1992.
“Signé par Cheikh Ahmad Mugwiza, alors Mufti, le message dénoncait l’incitation à la haine et à la division”, a déclaré Cheikh Hitimana.
« La communauté musulmane a pris la décision de s’éloigner de la politique de division qui a finalement conduit le pays au génocide contre les Tutsis », a-t-il déclaré.
L’Imam du CMR s’était également engagé à construire un monument à la mémoire des victimes du génocide des Tutsis massacrés au Mosquée, mais il s’est effondré par la suite.
Ému par cette bravoure, Kharidi Nshuti, Hadj et homme d’affaires, s’est engagé à donner à Rashid Bagabo, en guise de gratitude, un billet d’avion pour se rendre à la Mecque en Arabie Saoudite pour le pèlerinage islamique.
Source : New Times
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